Au début, ce confinement
semblait nous faire du bien : une occasion propice pour nous reposer et voir les choses autrement, du temps pour
la famille, les enfants, des moments d’intimité et de dialogue avec nos époux,
nos épouses… et surtout, la quatrième saison de « La casa de Papel »
était sur Netflix. Un « must watch » à couper le souple. Ce feuilleton
inébriant est tombé au bon endroit au bon moment. Nos campus étaient fermés, on allait plus au
boulot, on ne sortait presque pas…du coup, on passait des journées à imaginer
ce que l’équipe du « Professeur » ferait pour sortir les réserves
d’or de la banque espagnole. Espoir, colère, déception, surprise,
consolation…le suspense était au rendez-vous. Les émotions se succédaient et
s’accumulaient au fur et à mesure que des nouveaux épisodes apparaissaient. La
mort de notre chère « Nairobi » viendra tout chambouler. Alors qu’elle
venait de survivre au tir du « sniper » qui l’a guettée par la
fenêtre, elle s’est laissée abattre par le redoutable Gandia, ce béret vert
aussi professionnel qu’un marine. La colère de la bande était certainement
partagée par des téléspectateurs. Ah oui, le chef de la sécurité du directeur
de la banque les a eus. Le soulagement viendra de la belle « Tokyo »,
qui parviendra à immobiliser cet enragé de Gandia avant qu’il ne décime toute
la bande.
Alors que La casa de papel
était en rebondissement sur nos écrans, l’incertitude gagnait la « casa de la familia ». Covid19
frappait plus fort là dehors et à l’intérieur, ce n’était plus aussi simple. En
quelques semaines les réfrigérateurs se sont vidés, nous étions en rupture de
stock des blagues et mèmes, des histoires à se raconter n’étaient plus
intéressantes, les films, les séries, les jeux vidéo…tout devenait ennuyant et
fatiguant. Le confinement nous a fermé au monde mais nous a ouverts à
nous-mêmes, à nos époux et épouses, à nos enfants. Nous avons découvert qui
nous étions vraiment. Nous avons appris à découvrir cet inconnu que nous avions
épousé, nos propres enfants pour qui nous étions devenus des étrangers. Les
masques sont tombés, le vrai caractère a fait surface. Pour certains, c’était
une heureuse surprise mais pour d’autres, la déception du siècle. Finalement,
les gens n’étaient pas aussi forts, aussi riches, aussi charismatiques, aussi
beaux qu’ils prétendaient l’être. Le bureau, l’auditoire, le boulot, le
commerce, l’église, les gymnases, les salons de beauté, les bars, les
pharmacies et tous ces endroits « secret-grandeur » étaient fermés.
Fini le « busyness », acheter du maquillage n’est plus possible, on
ne peut plus s’éclipser pour prendre sa dose de viagra... Il fallait désormais
apprendre à être soi-même, à s’accepter sans maquillage, sans dopage, sans
accessoire, sans justification. C’est ça le vrai confinement.
Le choc arrivera de sitôt qu’il
repartira si tôt. Ah ouais! On avait plus de secret à se cacher, sauf celui de
maman. Elle ne tardera pas non plus à le dévoiler. Elle s’est rendue compte que
le niveau de raisonnement de son fils ainé n’a pas changé depuis 5 ans. Cela
fait un an qu’elle soupçonne une sorte de « retard de croissance »
intellectuel chez son fils qui est maintenant en deuxième licence. L’occasion
de faire un diagnostic manquait à maman. Finalement, elle a compris que Sammy
ne sait pas ce dont il est capable. Il a accumulé un tas de mots dans sa tête
mais il n’a acquis aucune compétence à part parler plus fort lorsqu’il est
provoqué. Avec sagesse, maman décide de crever l’abcès : « Mon fils,
que feras-tu après ce confinement ? » « Défendre mon
mémoire », répondit-il. « Mais je ne te vois ni lire ni écrire
quelque chose…Si tu n’es pas devant la télé, tu es au lit, ajouta maman Bertha.
La seule chose qui t’occupe c’est ton téléphone. Plus rien ne te passionne à
part l’affaire Moise Mbiye et le dossier Vital Kamerhe. N’est-ce
pas ? » Et voilà Sammy qui fait ressortir son grand talent : se
tenir débout et crier sur quiconque questionne ce qu’il fait. « Je ne te
comprend pas maman, tu es en retard. C’est l’ère du numérique. Les
affaires Mbiye et Kamerhe sont partout sur les réseaux sociaux (l’unique
bibliothèque qui mérite son temps). Lorsque je finis ma série du jour, je
chatte avec mes amis. Tout le monde en parle. Et toi tu fais que me bassiner. »
Il s’excusa et partit dans sa chambre.
« C’est tout ce qui a
changé chez mon fils. Parler en haute voix pour faire valoir un
argument. » Bertha se tourna vers son mari Cyprien. « As-tu compris
maintenant pourquoi on augmente les frais académiques à l’université chaque
année ? » « A l’œuvre on connaît l’artisan. Maintenant je comprends,
plus on monte de classe, plus fort on parle. C’est l’unique compétence qu’on
apprend efficacement à nos enfants » répondit-il avec désappointement
avant de remettre le nez dans les livres. Que sera-t-il après ses études ?
Parlementaire peut-être ? Dans ce pays tout le monde a donc appris à faire
la politique, l’art de parler plus fort sans interroger le contenu de son allocution ?
Est-ce ce que nos universités enseignent ? Y-aura-t-il de changement après
cette crise sanitaire ? Le questionnement de madame Bertha est resté sans
réponse.
Mais que sera cette vie après
Covid19? Le monde va-t-il changer ou restera-t-il le même ? Les
scientifiques sont divisés sur la question. D’un côté certains pensent que l’on
reviendra à l’avant Coronavirus, d’un autre, convaincus que rien ne sera plus
comme avant. Dans tous les cas, il faut que la situation de notre pays change
car même la vie avant Covid19 n’était pas celle qu’il fallait souhaiter à toute
une nation. Les universités vont jouer un grand rôle dans ce changement, sans
pour autant dire qu’elles sont à la base de tous les maux dans ce pays. Je
reconnais cependant que c’est dans ces écoles que sont formés les cadres dans
tous les secteurs. Ce qui marche c’est à notre actif et ce qui ne marche pas
c’est à notre passif. Il est temps de l’admettre.
Pendant plus de deux mois le
monde consomme sans produire. Cela coute très cher à nos économies. Il faudra
nous relever de la récession le plus rapidement possible et renouer avec la
croissance. Tout le monde, des ménages à la présidence de la République, doit
faire quelque chose. Néanmoins, l’impact de nos efforts dépendra de notre
capacité à coordonner le travail, à adapter les politiques publiques, à
intégrer des reformes et à réorienter les efforts, les investissements et les
financements. Le seul danger à éviter, ce sont les débats et tiraillements
politiques inutiles. Nos médecins, nos infirmiers, nos épidémiologistes et tous
les scientifiques du domaine médical ont fait leur part. Ils ont sauvé et
continuent de sauver des vies. Qu’ils trouvent ici l’expression de notre
gratitude.
Après la pandémie, c’est à nous
tous qui étions confinés de faire notre part : relever l’économie. Les
intellectuels doivent montrer de quoi ils sont capables. La crise sanitaire
mondiale a fait une sorte de remise à niveau mondiale, offrant à chaque pays la
possibilité d’un nouveau départ. La pensée économique se peaufine, le discours
politique s’adapte et les talents se préparent. Les entreprises s’entassent à
la ligne de départ en attentant le coup de sifflet: « Prrrrr sortez de vos
maisons ». Le peuple attend ce moment avec impatience en vue de se remette
au travail. Il faut relever les économies et c’est par le travail qu’on y
arrivera.
Ce ne sera plus le moment de se
lamenter de l’Occident, de nous critiquer mutuellement ou accuser les autres
pays de complot, tellement on aura à faire. Economistes, juristes, ingénieurs, sociologues,
politologues, internationalistes, géologues, agronomes, comptables…les ménages,
les communes, les villes et territoires, les provinces, le pays et le peuple
tout entier ont besoin de nous. C’est le moment de ressortir nos armes les plus
efficaces pour lutter contre la pauvreté et aider le pays à garantir à son
peuple une croissance inclusive. Il est temps de faire attendre nos voix pour
obtenir des reformes à tous les niveaux, à partir de nos universités.
Avons-nous quelque chose à demander à l’Etat en termes de reformes pour
participer à la relance mondiale et saisir l’opportunité qui s’offre aux pays
ayant un marché intérieur énorme? Nous préparons-nous au nouveau style de
travail, le télétravail qui risque d’être la norme dans la plupart
d’organisations et entreprises qui auront tiré la leçon de la situation? Nos
écoles et universités sont-elles prêtes à changer la manière d’enseigner pour
donner aux étudiants ce qui est utile, pratique et adapté au nouveau contexte?
Quant à l’homme politique, le
travail continue, il prépare le nouveau mensonge qui deviendra la vérité des
élections à venir. Si nous restons bras croisés, tout ce qui aura changé et qu’on
sera en train de discuter ce sera la couleur de sa barbe. Il nous aura pris au
dépourvu comme le Coronavirus. Les activistes politiques se préparent. Ils vont
bâtir sur les dissensions internes pour former des nouveaux groupes de pression
et transformer leurs luttes intestines en « bataille du peuple ». Ils
seront nos élus de demain.
Chers intellectuels, éminents
Professeurs, estimés Chefs de travaux, distingués Assistants et tous les
cadres, je sais que votre calme traduit une certaine sagesse. Je vous prie,
faites quelque chose. Sauvons notre peuple, sauvons notre université avant
qu’elle ne se transforme en cimetière des cerveaux. Sauvons notre société,
sauvons le contenu de la toile, sauvons notre économie, aidons le peuple à
racheter sa réputation, aidons le pays à retrouver sa grandeur. Vous avez le
génie qu’il faut. La seule chose que nous vous demandons, c’est de mettre ce
génie au service du peuple. Nos étudiants sont confinés, vous aussi mais au
moins vos idées, vos cerveaux ne le sont pas. Donnez une chance à ce pays.
Faisons quelque chose.
Professeurs, nous sommes au
bout du gouffre, faites quelque chose pour sauver « La Casa Del Pueblo ».
Jacques Muhindo Vyalirendi est Chercheur,
Enseignant-Formateur et Interprète de Conférence. Il vous remercie de votre retour sur ce
billet du blog. Sentez-vous libre de commenter en Français, en Anglais, en
Swahili, en Lingala ou en Portugais. Avez-vous un commentaire personnalisé, une
histoire à raconter, n’hésitez pas de le contacter sur +254720074063.
Merci de commenter ci-dessous.
👏👏👏👏
ReplyDeleteYes brother, am delighted to read this himour that you had been able to get out of your cabouche on covid19, nevertheless the greatness of the Master of the masters should reside there prime on board. thank you with god we are always victorious.
DeleteThank you so much for your feedback. With God we are always victorious. Your remark is noted with thanks
DeleteYes brother, am delighted to read this himour that you had been able to get out of your cabouche on covid19, nevertheless the greatness of the Master of the masters should reside there prime on board. thank you with god we are always victorious.
ReplyDeleteC'est merveilleux et c'est une pensée profonde qui nous touche tous et qui est vraiment actuelle.
ReplyDeleteMerci infiniment
DeleteC'est un message d'éveil très important. À chacun de jouer pleinement son rôle pour l'avancement du pays
ReplyDeleteBien sûr. Merci infiniment
DeletePas de temps pour m'y concentrer, pas assez de temps pour le faire , je suis tellement occupé pour ça, je suis busy voyons, .... sont nos quelques expressions quotiennes d'avant la Covid 19. La nature a semblé capter pour une fois nos supplications, comme qui dirait que le temps soit et le temps fut. Du temps à revendre, du temps et encore du temps. Il me faudra trouver de reponse refléchie pour le ... Que feras-tu apres la crise Covid 19...., parce que pour une fois, lemonde s'est arrêté et nous a offert du temps. Thanks Mr NaGrow
ReplyDeleteMerci pour votre commentaire. Il est de notre responsabilité de penser le monde de demain. Thank you again
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